C’est à une bataille juridique acharnée et complexe que se sont livrés pendant plus de 3 heures jeudi 24 mai, les avocats des parties civiles et ceux des prévenus de l’Erika. Une bataille qui se situe sur le terrain du droit et rien que du droit, et qui pourrait aboutir à l’annulation totale de la procédure de 12 ans entamée depuis le naufrage du navire le 12 décembre 1999.

Une fin impensable pour les parties civiles et collectivités de Bretagne et de Vendée qui ont vu leurs côtes souillées par 20 000 tonnes de pétrole répandues sur 400 kilomètres, une catastrophe écologique pour la faune et la flore du secteur. Pourtant, c’est bien ce que préconise l’avocat général de la Cour de cassation, Didier Boccon-Gibod. Ses conclusions, connues depuis le mois d’avril, n’ont cessé de susciter l’émoi chez les victimes de la marée noire et les écologistes, telle Eva Joly qui a été jusqu’à dénoncer une « complicité » entre l’Etat et Total.


L’avocat général a cependant réaffirmées ses conclusions lors de l’audience : « si je critique la décision de la Cour d’appel, je ne la dénigre pas. Je comprends que (mon) avis heurte les consciences et fasse scandale, mais la cassation totale et sans renvoi est à mes yeux, et je le constate avec tristesse, est la seule solution juridiquement possible. » Selon lui en effet, la loi du 5 juillet 1983 –réformée depuis- n’était à l’époque pas conforme aux Conventions internationales de Montego bay (convention des Nations Unies sur le droit de la mer, 1982) et Marpol (convention sur les pollutions maritimes, 1978) qui s’appliquent dans le cas de l’Erika et qu’elle était censée transposer. Par conséquent, cette loi n’était pas applicable et la juridiction française non compétente pour juger l’affaire.

Par ailleurs, l’indemnisation pour préjudice écologique qui avait été reconnue par la Cour d’appel ne pouvait, selon lui, s’appliquer sachant que celui-ci n’est pas reconnu par la Convention sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution (CLC 69/92)

Les plaidoiries des 3 avocats des prévenus (Total qui était l'affréteur du bateau, la société de classification Rina, l'armateur Giuseppe Savarese et le gestionnaire Antonio Pollara) et des 3 avocats des parties civiles (collectivités de Bretagne, des Pays-de-Loire et associations de défense de la nature) amèneront-elles la formation de 10 juges -contre 3 d’ordinaire- à en décider autrement ? Leur délibération, annoncée pour le 25 septembre 2012, n’est pas liée à l’avis de l’avocat général même si ce dernier est habituellement suivi

Lire la suite de l'article de Béatrice Héraud sur Novethic.

Valéry